La bataille d’Auray
En 1364, Jean de Montfort et Charles de Blois, les deux prétendants au duché de Bretagne s’affrontent sur les terres à proximité de la Chartreuse. En pleine guerre de Cent Ans, cette dernière bataille de la guerre de Succession de Bretagne, se révèle décisive pour l’avenir du duché.
La mort du duc Jean III
En 1341, Jean III duc de Bretagne meurt sans descendance ni ordre de succession. Deux héritiers potentiels se disputent alors le duché : Jeanne de Penthièvre, sa nièce, et Jean de Montfort, son demi-frère. Jeanne de Penthièvre est l’épouse de Charles de Blois, neveu du roi de France Philippe VI de Valois. Le roi prend officiellement le parti de Jeanne de Penthièvre et Charles de Blois, tandis que Jean de Montfort est soutenu militairement par le roi d’Angleterre. Jean de Montfort meurt en 1345. Son fils, aussi nommé Jean de Montfort, marche dans les pas de son père aidé par l’Angleterre où il a passé son enfance. Malgré des trêves et des négociations, la guerre de Succession fait rage pendant 23 ans.
Le siège du château d’Auray
En 1364, Jean de Montfort assiège le château d’Auray tenu par les hommes de Charles de Blois. Averti, il rassemble ses troupes. Rejoint par Bertrand du Guesclin, ils se dirigent vers Auray. L’échec des dernières tentatives de négociation déclenche une bataille rangée.
Une bataille sanglante et décisive
Le 29 septembre 1364, jour de la Saint-Michel, les deux armées s’affrontent sur les terres qui surplombent le marais de Kerzo. Les chroniqueurs estiment 3500 à 4000 Franco-Bretons contre 1800 à 2900 Anglo-Bretons. L’affrontement sanglant coûte la vie à Charles de Blois. Jean de Montfort devient alors Jean IV duc de Bretagne, reconnu par le Traité de Guérande le 12 avril 1365. Mais, la Bretagne reste divisée entre les deux camps.
La chapelle Saint-Michel-du-Champ
Signe de réconciliation, en mémoire du combat et des défunts, Jean IV fait construire une chapelle, à l’emplacement du champ de bataille. Il la dédie à l’archange saint Michel, ange combattant dont la fête est célébrée le 29 septembre, jour de la bataille d’Auray.
En 1371, la chapelle devient une collégiale, desservie par un doyen et huit chanoines. La collégiale Saint-Michel formait un carré comprenant la chapelle et trois bâtiments entourant un petit cloître.
Le monastère de la Chartreuse
La Chartreuse est le seul monument d’architecture cartusienne (réalisée par les moines Chartreux) existant encore dans l’Ouest de la France. L’ancien monastère est communément appelée Chartreuse d’Auray bien qu’il soit situé sur la commune de Brec’h.
L’arrivée des Chartreux
En 1480, François II duc de Bretagne, demande au Pape Sixte IV le changement de la collégiale Saint-Michel en monastère de Chartreux. Le 29 mars 1482, un prieur et douze religieux viennent remplacer les chanoines. Les Chartreux y vivent jusqu’à la Révolution, grâce à leurs revenus et avec l’aide de bienfaiteurs privés.
L’empreinte architecturale des Chartreux
L’architecture du monastère obéit à des règles de construction définies par l’Ordre des Chartreux. Toutes les Chartreuses sont construites sur le plan de la maison mère de l’Ordre, appelée la Grande Chartreuse et située dans l’Isère. À leur arrivée, les moines rachètent les terres environnantes pour créer un désert, permettant leur isolement avec le reste du monde. À Brec’h, les moines vont, dans un premier temps, utiliser les bâtiments de la collégiale. Puis, ils engagent des travaux et des constructions afin d’adapter les lieux à leur mode de vie particulier.
L’ordre des Chartreux
Les Chartreux forme un ordre semi-érémitique, considéré comme l’un des ordres les plus austères. La règle prescrit la clôture quasi perpétuelle, le silence quasi absolu, de fréquents jeûnes et l’abstinence de viande.
Le grand cloître
La vie des monastères de Chartreux s’organise autour d’un immense cloître donnant accès à des cellules. A Brec’h, les Chartreux construisent ce grand cloître, à partir de 1574. Aujourd’hui disparu, il était entouré d’une vingtaine de cellules possédant chacune un jardin. Chaque père avait sa cellule individuelle, dans lequel il vivait, priait et travaillait, isolé de la communauté. Les frères vivaient, eux, dans d’autres bâtiments du monastère.
D’importants travaux aux XVIIe et XVIIIe siècles
L’organisation actuelle des bâtiments correspond à celle mise au point par les Chartreux aux XVIIe et XVIIIe siècles. À partir du milieu du XVIIe siècle, les moines réalisent d’importants travaux qui transforment les bâtiments de l’ancienne collégiale. Le petit cloître, les bâtiments attenants et la chapelle Saint-Michel sont en partie ou entièrement reconstruits. Au début du XVIIIe siècle, 17 tableaux illustrant la vie de saint Bruno, fondateur de l’Ordre des Chartreux, sont installés dans le petit cloître. Toujours visibles, ils sont l’œuvre d’un frère et de deux autres peintres dont Jean-Vincent Lhermitais. Ces peintures, inscrites au titre des Monuments Historiques, sont des copies de la célèbre galerie d’Eustache Le Sueur, peinte pour le cloître des Chartreux du Luxembourg de Paris.
La Chartreuse à la Révolution
Les moines sont expulsés en 1791. La Chartreuse est vendue comme bien national. Son nouveau propriétaire démolit le grand cloître pour en récupérer les matériaux. En 1808, Gabriel Deshayes, prêtre d’Auray, et Mathurin Legal, supérieur du séminaire et vicaire général du diocèse de Vannes, rachètent la Chartreuse, avec l’aide financière de Joseph-Marie Barré, bienfaiteur des hospices. Gabriel Deshayes y installe des professeures venues de Paris et les Filles de la Sagesse, afin de créer une école pour les enfants sourds. Cette école ouvrira une classe pour les malvoyants en 1896.
Au milieu du XXe siècle, leur mission d’éducation décline au profit d’une maison de retraite pour sœurs ainées malades.
Les monuments dédiés aux victimes de Quiberon
Dans l’Ouest de la France, des populations déçues des conséquences de la Révolution organisent la Contre-Révolution. Le 27 juin 1795, le débarquement de Quiberon, ayant pour objectif de renverser la République, est un échec. À Brec’h, deux monuments commémorent cet événement et ses victimes.
Déceptions et insurrections
En Bretagne et dans l’Ouest de la France, différentes réformes déplaisent. Les Bretons sont désormais soumis aux impôts de la République, alors qu’ils avaient longtemps échappé à une partie du fisc royal. En 1790, l’Assemblée Constituante vote la constitution civile du clergé, par laquelle les religieux se trouvent sous l’autorité de l’Etat. Les prêtres réfractaires, très majoritaires en Morbihan, sont arrêtés et exécutés. À cela s’ajoute la levée des 300 000 hommes, jugée inégalitaire, dont la République a besoin pour défendre ses frontières à l’Est.
La Chouannerie
Les mécontentements entrainent le pays dans une guerre civile. Les populations insurgées s’organisent pour rétablir la monarchie et la liberté religieuse. Ainsi, nait la chouannerie. En pays d’Auray, les Chouans ont à leur tête Georges Cadoudal, né au village de Kerléano situé à Auray. Meneur d’hommes et fin stratège, il joue un rôle important dans la Contre-Révolution.
Une tentative de paix échouée
A partir de 1794, l’État prend plusieurs décisions pour apaiser la situation : la nomination du général Hoche pour pacifier l’Ouest insurgé et l’amnistie à ceux qui déposeront les armes. Des négociations aboutissent au traité de paix de Mabilais, mais peu de chefs royalistes et aucun morbihannais, acceptent de le signer.
Le débarquement de Quiberon
Le débarquement de Quiberon est la dernière tentative importante de la Contre-Révolution. L’action, dirigée par le comte de Puisaye, a pour but d’organiser le débarquement des émigrés (officiers, soldats, prêtres et nobles) de l’Angleterre vers la Bretagne, avec le soutien financier et logistique des Anglais. Ce débarquement est nommé l’expédition de Quiberon.
Le 27 juillet 1795, des navires chargés de plus de 5000 hommes et d’équipements débarquent sur les plages de Carnac et Quiberon. Plus de 12000 chouans présents, formant l’armée catholique et royale de Bretagne, les attendent. Mais, l’expédition tourne au désastre. La discorde entre les chefs de commandement, les comtes Puisaye et d’Hervilly, permet au général Hoche d’enfermer les royalistes dans la presqu’île de Quiberon. Le 21 juillet 1795, 6232 émigrés et chouans sont prisonniers. Jugés en partie à Auray, la majorité est libérée ou reste détenue. 750 sont condamnés à mort. Parmi eux, 206 sont fusillés près des marais de Kerzo à Brec’h, et enterrés sommairement sur place. Ce lieu est aujourd’hui nommé le Champ-des-Martyrs.
Les monuments commémoratifs
En 1814, les ossements des fusillés sont transportés à la Chartreuse, à la demande de Gabriel Deshayes, prêtre d’Auray. La même année, le duc d’Angoulême vient se recueillir devant les restes des victimes. Il est le fils du futur Charles X et l’époux de Marie-Thérèse de France, unique enfant survivant de Louis XVI et Marie-Antoinette. Avec l’autorisation de Louis XVIII, est projetée la construction d’un monument dédié aux victimes de Quiberon. Le projet est géré par une commission, sous la présidence du ministre de l’Intérieur, et financé par une souscription nationale. Finalement, deux monuments sont érigés à partir de 1825 : un Mausolée à la Chartreuse et une chapelle expiatoire au Champ-des-Martyrs. Leur inauguration a lieu le 15 octobre 1829, en présence de 15000 Bretons, de nombreux élus et d’évêques de Bretagne.
Le Mausolée
Accolée à la chapelle Saint-Michel, la chapelle funéraire abrite le mausolée de marbre sous lequel ont été déposés, dans un caveau, les ossements des fusillés. Il est l’œuvre de David d’Angers et Louis Petitot, son élève. Sur les façades, sont inscrits les noms de 952 victimes, et sont sculptés les portraits des principaux officiers de l’expédition.
La chapelle expiatoire s’élève au Champ-des-Martyrs, situé à 1km de la Chartreuse en direction de Sainte-Anne-d’Auray.
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