125 personnes sont venues défier la langue française au cloître de la Chartreuse, sur un texte inédit autour du Cirque !
Et pour (re)faire la dictée comme si vous y étiez, regardez la vidéo de la Grande Dictée
Dès ma plus tendre enfance, j’ai été fascinée par le cirque. Non par les numéros acrobatiques, les tours de passe-passe ou les facéties des chimpanzés, mais par le côté éphémère de la mise en place quotidienne du chapiteau. Les effluves des barbes à papa et des pommes d’amour caramélisées m’ont toujours affriandée.
J’ai eu la chance de pouvoir joindre l’utile à l’agréable en orientant mes études vers les accessoires du spectacle. Aujourd’hui je fais partie du sérail et chaque représentation m’oblige à la perfection.
Je suis en charge des garde-robes des baladins, guettant chaque imperfection éventuelle. Et des déchirures, j’en ai trouvé quelques-unes non prévues au programme, elles eussent terni ma réputation. Ce n’est pas le moment de bayer aux corneilles car il me faut tout vérifier.
La porte d’une des caravanes s’ouvre : l’intérieur sobre de la verdine contraste avec l’habit de scène que je porte précautionneusement et qui doit transfigurer la funambule qui m’accueille. Le justaucorps à sequins que je suis censée avoir soigneusement vérifié, est composé d’un camaïeu de tissus bleu ciel. La cernuatrice teste la solidité des coutures en réalisant avec souplesse et grâce des acrobaties que je pensais impossibles à exécuter dans une pièce aussi exiguë. La loupiote à led colorée qui nous éclaire, fait chatoyer les matières soutachées d’or, justifiant ainsi le surnom de sirène que les circassiens lui attribuent.
La toile aux grandes bandes rouges, jaunes et violette, montée la veille au soir dès notre arrivée, est à présent remplie de gradins à claire-voie habillés de velours cramoisi. Un homme fort élégant vient à ma rencontre. Je lui remets le costume de clown sur lequel j’ai passé quelques heures par jour à fixer les rembourrages. Quelles que soient les retouches ayant été réalisées à l’atelier j’ai hâte de voir comment ce frac à basques bleu marine et aux passementeries chamarrées va prendre vie sur scène.
Ce contre-pitre, surnommé « Queue-de-pie », se glisse dans son costume, enfile un bras, puis l’autre, fixe une ceinture camouflée dans le vêtement, ajuste manchettes et épaulettes. Ainsi attifé, le clown commence à faire quelques pas, puis de grandes enjambées. À brûle-pourpoint il part dans une course effrénée autour de la piste et soudain s’affaisse. Je ne vois plus dans les clairs-obscurs du sol qu’un tas de frusques inertes. L’auguste se relève doucement, sourit et me susurre « Pas mal ! » Je sais que l’essayage a passé la rampe.
Accolé au chapiteau, le barnum qui abrite les loges est rempli de miroirs, de pendrillons, de lumières et de bruits. Dans cette cacophonie, je dois achever les reprises sur le costume du magicien et de son assistant lilliputien un tantinet engagés dans un différend inopportun. Pendant ce temps, indifférent au remue-ménage ambiant, le clown, s’attelle à maquiller son visage et son cou d’une épaisse couche de fard blanc composé de saindoux. Saisissant un pinceau, il trace d’une main experte le contour de ses yeux et poursuit la transformation de son visage qui semble blême, voire exsangue.
Et puis le rythme s’accélère. Soi-disant considérés, dans ce cirque, comme des objets de mauvais augure, les derniers couvre-chefs de l’auditoire sont promptement escamotés par l’ouvreuse.
Dans les dernières minutes avant l’entrée en scène, l’arène ressemble à un navire qui s’apprêterait à larguer les amarres. Tout l’équipage est sur le pont et s’affaire à prendre sa place dans les rouages bien huilés de la séance. J’aide les saltimbanques pour une fermeture Éclair réticente, vérifie la coiffure ou un revers de manteau. Les artistes attendent leur entrée, dans la pénombre encombrée de charivari, d’odeurs d’échauffement. Attentifs, ils écoutent le bruissement des spectateurs qui s’installent. Ils se concentrent.
Que le spectacle commence !
J’espère que, par ce que j’ai pu vous dévoiler de l’ambiance du cirque, vous serez tentés d’approcher de plus près les membres de cette grande famille, saluant ainsi leur courage et leur professionnalisme.
La remise des prix de la Grande Dictée s’est tenue jeudi 13 avril à 18h, dans la salle du conseil municipal en mairie. L’occasion pour les participants de récupérer leur écrits et de découvrir le nom des grands gagnants.
Bravo à tous !